Une belle réinterprétation
Dans ce jeu, on incarne donc P, création de Geppetto qui se réveille dans une ville dévastée par la révolte des marionnettes. Visiblement pas tout à fait humain lui-même, P ne devrait pas pouvoir mentir, car les marionnettes, contrairement aux humains, ne peuvent dire que la vérité.
Et pourtant régulièrement dans le jeu il est amené à faire des choix ou à répondre avec la possibilité ou non de mentir (c’est ce comportement en grande partie qui définit quelle fin de jeu le joueur obtient).
Loin d’être anecdotiques, ces choix contribuent pleinement à l’ambiance triste et mélancolique du jeu dans lequel on traverse plus des lieux de mort que des lieux de vie. Et les quelques personnages qui nous guident dans notre quête (en tout premier lieu retrouver Geppetto puis sauver Krat, la ville où tout se déroule) ne respirent pas non plus la joie de vivre.
Cette ambiance est sublimée par une direction artistique (ambiance steampunk fin 19ème) et des graphismes superbes même en mode performance. Le mode qualité graphique fait un peu mieux niveaux ombres et reflets, néanmoins il subit quelques petites baisse de framerate de temps en temps, mais rien de réellement gênant ; j’ai d’ailleurs préféré cette façon de jouer, trouvant la vitesse de jeu en performance un peu trop élevée à mon goût.
En ce qui concerne la bande sonore, elle est globalement très discrète, mais c’est pour mieux laisser la place aux bruitages inquiétants de la ville et des mannequins qui y résident. On trouve des disques contenant des créations originales très réussies (enfin, si on aime autre chose que le rap ou le métal).
Là où ça plagie sans vergogne
En termes de système de jeu, les auteurs n’ayant même pas essayé de faire illusion, autant le dire directement : c’est une grosse repompe des Souls-like et autres Elden Ring.
Deux coups d’attaque, des attaques spéciales liées aux armes, une parade qui n’arrête et ne donne l’avantage que si elle est parfaite, une esquive, quand on meurt on perd son ergo (monnaie d’expérience et d’achat) qu’on peut récupérer en revenant le chercher à l’endroit de la mort, les stargazers qui sont l’équivalent des feux de camp où l’on réapparaît et on se remet à fond en l’échange du repop des monstres, etc.
Chaque niveau nous fait gagner un point de statistique que l’on met dans une des six stats disponibles faisant ainsi augmenter la vie, l’endurance, les résistances ou encore les dégâts faits par P. Les armes sont gérées par un système de lettres allant de D à S qui indiquent quels statistiques influent le mieux sur leur efficacité. Chaque arme est composée d’un duo arme/manche et très vite dans le jeu on peut interchanger le manche d’une arme avec un autre pour modifier les coups spéciaux dont on dispose.
P dispose également d’un bras gauche totalement mécanique qui peut être modifié pour devenir une arme à distance, un grappin ou encore un lanceur d’attaques élémentaires.
Au rayon des améliorations de personnage, en plus des statistiques, on trouve une arborescence d’évolutions de P (l’organe-P) contre des quartz que l’on ramasse ce qui permet d’encore plus personnaliser sa poupée… ou son enfant ?
J’aurais cru sans problème quiconque m’aurait dit que Lies Of P était un jeu FromSoftware.
Et pourquoi pas ?
Mais est-ce un problème ? En l’occurrence non, car le jeu a pour lui sa magnifique direction artistique et son histoire prenante qui est souvent le défaut des Souls-like.
Certains changements peuvent également être vus comme des améliorations du système, comme le fait que si on meurt sans avoir récupéré son ergo, on ne le perd pas totalement.
Le système de combat est efficace. La parade est à privilégier à l’esquive, car cette dernière a tendance à éloigner et à casser le tempo des combats.
Une parade parfaite permet de ne prendre aucun dégât et de riposter rapidement quand une parade classique fait perdre une portion de vie qui peut être récupérée tout ou partie en frappant l’ennemi. Les coups spéciaux liés à ce qu’on tient dans les mains s’utilisent avec parcimonie, car la jauge permettant de les lancer monte lentement.
Chaque combat de boss est un mini challenge avec ses spécificités propres et les consommables que l’on ramasse en quantité limitée peuvent faire la différence, mais sont perdus en cas d’échec. Avec des fragments de météorites, on peut aussi invoquer une aide de combat pour le boss. Efficace et capable de prendre l’aggro, cela reste loin d’être un code de triche, car l’aide peut très vite se faire exploser.
Les combats de boss imposent de bien réfléchir aux mouvements de l’ennemi, à ses faiblesses et à l’équipement qui est le plus optimal pour l’affronter.
Les monstres normaux sont là pour le côté endurance du jeu. Peu dangereux, ils peuvent à l’usage vous faire vous demander si vous allez atteindre le prochain Stargazer vivant ou pas d’autant que les designers on su mettre à profit les environnements pour tendre des tas de pièges dans lesquels on tombe quasi systématiquement la première fois.
P se chauffe d’un bon bois
Avec une histoire originale sur des bases pourtant connues, une très belle réalisation et un système de jeu éprouvé peut-on dire que Lies Of P est un jeu parfait ?
Non, quand même pas. Déjà, et ça chacun aura son avis dessus, la difficulté du titre est élevée (même en normal) malgré les quelques adoucissements au gameplay, ce qui bloquera les joueurs réticents à la difficulté des Souls-like.
Ensuite, même si le jeu fait pas mal illusion sur ce point, l’exploration est en réalité très limitée. Sans aller jusqu’à dire qu’on progresse dans des couloirs, il n’y a pas beaucoup de chemins pour arriver à destination.
Enfin, j’ai trouvé que certains boss marionnettes manquent pas mal de charisme, ce qui contrebalance un peu l’effet “waouh” de la rencontre.
Néanmoins, ces défauts ne sont pas grand chose à côté des qualités du titre qui finalement en tant que Souls-like souffre surtout si on le compare à l’étendue et la liberté d’un Elden Ring.
Cependant, par rapport à ce qu’il souhaite faire et à ses ambitions affichées, Lies Of P est un excellent jeu pour le style qui laissera des souvenirs et images en tête pendant un bon moment.
Testé par Aragnis sur PlayStation 5 avec une version fournie par l’éditeur.