En Malaisie, “sous les gants de latex, les mains de la souffrance” des travailleurs



Le quotidien suisse Le Temps raconte à sa une les dessous de l’industrie des gants en latex en Malaisie, fabriqués par des petites mains recrutées au Népal, au Bangladesh et ailleurs puis maltraitées, alors que la demande explose en raison de la pandémie.

Le titre et la photo sont assez énigmatiques, mais la réalité qu’ils décrivent est très terre à terre. Le quotidien suisse Le Temps s’est intéressé ce vendredi 21 août aux conditions de travail des petites mains qui fabriquent, en Malaisie, les gants en latex dont le monde fait une consommation effrénée en cette période de pandémie, en lançant à sa une : “Sous les gants de latex, les mains de la souffrance.”

L’enquête du journal révèle que :

Les travailleurs migrants qui les produisent en Malaisie subissent des conditions proches du travail forcé.”

Le pays du Sud-Est asiatique, grand producteur de caoutchouc, fabrique en effet “deux tiers des gants jetables en latex ou en nitrile – une forme de caoutchouc synthétique – vendus sur le plan mondial”.

Mais selon Bent Gehrt, qui dirige l’ONG Workers Rights Consortium, interrogé par Le Temps, “les Malais ne veulent pas effectuer le travail mal payé, difficile et dangereux proposé” par “Top Glove, Hartalega et Kossan”, les trois principales entreprises du secteur.

Le travail lui-même est pénible et risqué. Les températures près des fours utilisés pour chauffer les moules trempés dans du latex ou du nitrile peuvent atteindre 60 degrés. Les ouvriers manipulent aussi fréquemment des produits chimiques dangereux, comme de l’acide et du chlore. Les accidents sont fréquents.”

En conséquence, c’est “d’Indonésie, du Népal, du Bangladesh et de Birmanie”, plus pauvres, que viennent la plupart des 26 000 ouvriers de ces entreprises.

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Et “pour les recruter, raconte le quotidien de Lausanne, les producteurs de gants font appel à des agents dans le pays d’origine des travailleurs, qui sous-traitent la procédure à d’autres intermédiaires, détaille Andy Hall, un militant pour les droits des travailleurs migrants en Asie. Ces divers acteurs facturent de larges sommes aux travailleurs, ostensiblement pour leur procurer un passeport, leur faire passer des contrôles médicaux et couvrir leurs frais de voyage.”

Une procédure opaque et coûteuse pour les petites mains du latex, d’autant plus que “dans les faits, tout le monde se sucre au passage, et de nombreux pots-de-vin sont versés”, glisse Andy Hall.

Ainsi, précise le journal, “Taha [les prénoms des travailleurs ont été modifiés], un ex-employé de Top Glove, dit qu’il a dû verser 165000 roupies népalaises [près de 1 200 euros, soit environ l’équivalent d’un an de salaire moyen au Népal] à l’agent qui est venu le recruter dans son village”.

Ou encore :

Lorsque les recruteurs sont arrivés dans le village de Daarul, dans un coin reculé du Népal, à la recherche de jeunes hommes prêts à s’expatrier en Malaisie, le paysan de 32 ans n’a pas hésité une seconde. ‘On m’a dit que je travaillerais dans un supermarché et que je toucherais un bon salaire’, se remémore-t-il. Il leur verse 120 000 roupies népalaises [850 euros] pour couvrir ses frais de recrutement. Mais une fois arrivé à Kuala Lumpur [en Malaisie], il découvre une autre réalité. ‘J’ai appris que je travaillerai dans une usine de gants en latex, relate-t-il. La paie était moins bonne que promise et les conditions de travail plus dures.’”

Plus généralement, rien ne s’arrange quand ces ouvriers arrivent, “déjà endettés”, en Malaisie. Leur salaire est inférieur de moitié au salaire moyen local. Le coût de leur nourriture et de leur logement, “des dortoirs qui peuvent accueillir jusqu’à̀ 48 personnes”, et parfois “des containers de chantier empilés les uns sur les autres”, en est encore déduit. Les cas de maltraitance sont fréquents. Ces dernières années, plusieurs cas de suicides ont été enregistrés.

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Et, comme le raconte Daarul, qui aimerait rentrer au Népal :

Mon salaire ne suffit même pas à faire vivre ma famille au Népal, sans même envisager l’achat d’un billet de retour. Je suis pris au piège.”

Cette situation, amplifiée par l’explosion de la demande mondiale, a quelque peu attiré l’attention hors de la Malaisie, explique Le Temps : “En juillet, les États-Unis ont interdit les importations de gants produits par Top Glove après avoir identifié des preuves de travail forcé, dont ‘un asservissement par l’endettement’”. Ce qui a poussé les entreprises malaisiennes à débloquer des fonds pour rembourser les frais de recrutement ou procéder à des “réparations” vis-à-vis de leurs employés. Avec des sommes jugées “largement insuffisantes” par leur défenseur Andy Hall.

Pendant ce temps-là, le commerce des gants en latex est florissant : “En 2020, la Malaisie exportera 225 milliards de gants jetables [une hausse de 33 % par rapport à 2019], pour une valeur de 21,8 milliards de ringgits [malaisiens, soit plus de 4,4 milliards d’euros], selon les projections de l’association faîtière du caoutchouc Margma.”

Quant à Top Glove, qui “produit à lui seul 25 % des gants jetables consommés sur le plan mondial” :

Ses ventes mensuelles ont crû de 180 % depuis le début de la pandémie et son action a grimpé de 430 %. Son patron, Lim Wee Chai, vaut désormais 5 milliards de dollars, selon Forbes.”

Source

Né en mars 1998 de la fusion du Nouveau Quotidien, du Journal de Genève et de la Gazette de Lausanne, ce titre de centre droit, prisé des cadres, se présente comme le quotidien de référence de la Suisse romande et 

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