L’enquête au cœur de l’action
Celui qui n’aurait pu être qu’un spin-off quelconque venait mettre un coup de pied dans la fourmilière et cherchait à redynamiser la licence. Toujours centrée sur ses avocats stars, faisant des enquêtes de simples prétextes aux grands discours et contre-interrogatoires lors des procès, la licence Ace Attorney voyait sa dynamique complètement inversée avec les deux jeux sous-titres Investigations. En mettant les joueurs dans la peau de Miles Edgeworth (ou Benjamin Hunter en VF), célèbre procureur et némésis originel de Phoenix Wright, cette nouvelle licence revoyait sa boucle de gameplay. Exit les procès, qui n’existent plus, et place plutôt à de longues phases d’enquête au cours desquelles il faut glaner des indices, les analyser selon les moyens mis à disposition et les confronter entre eux afin d’en déduire des vérités ou, du moins, des pistes à explorer. Certes, l’emballage ressemble quand même beaucoup aux autres jeux de la licence, et ce n’est pas les interrogatoires de témoins et de suspects (qui fonctionnent exactement comme les procès habituels) qui changent la donne. Néanmoins, l’emphase mise sur l’enquête permettait de contenter celles et ceux qui appréciaient tout particulièrement cette partie des jeux de la saga principale. D’autant plus que la mise en scène diffère assez largement en permettant, pour la première fois dans l’histoire de la licence, de contrôler directement le procureur en le faisant bouger sur les scènes de crime afin de vérifier tous les indices. Un moyen de remplacer l’habituel curseur qui permettait de pointer les indices et provoquer les réactions des personnages qui entourent les héros, mais surtout de placer le joueur directement dans la peau du procureur, dans des jeux au ton plus solitaire, en s’éloignant des galeries de héros et du récit choral que l’on retrouve souvent dans les jeux principaux.
Les mécaniques sont toutefois très limitées, notamment dans le premier des deux titres de cette collection. Le premier jeu Investigations se limitait effectivement à un gameplay tournant autour de l’exploration des scènes de crimes, de la récupération d’indices et de la mécanique consistant à les combiner, trouver la bonne paire d’indices, afin d’en déduire une logique ou en tirer un nouvel argument à confronter aux témoins et suspects. Au-delà de ça, on retombait rapidement sur les interrogatoires qui n’apportaient pas de nouveauté par rapport aux précédents titres. Au bout d’un moment, une nouvelle mécanique fait son apparition, celle qui consiste à recréer la scène de crime sous forme d’hologramme pour en vérifier certains détails, mais pour les gens qui ont joué à la saga principale (et aux Apollo Justice), la mécanique n’est pas vraiment une surprise. Il faut plutôt chercher du côté du second épisode, qui lui est totalement inédit en occident et qui introduit au passage une mécanique inspirée des échecs. Celle-ci renouvelle la manière d’interroger certains témoins en modélisant leurs pensées sous forme de pièces d’échecs, qu’il faut éliminer pour prendre l’avantage ; un système plutôt curieux mais assez efficace, qui a le mérite de renouveler la manière de conduire les interrogatoires. Et ça corrigeait au passage le reproche que l’on peut faire au premier jeu, trop similaire aux autres titres de la saga.
Redécouverte et réinvention visuelle
Bien que le procureur soit infiniment plus sérieux que les Phoenix Wright et compagnie, lui qui fait assez peu de blagues et se contente de rechercher la vérité pour faire triompher la justice, cela n’empêche pas les deux spin-off Investigations de conserver l’humour qui fait le sel de la série. Bien aidé par sa galerie de personnages et de témoins, toujours loufoques, mais aussi par les interventions de personnages connus de la saga (comme l’inspecteur de police qui ne comprend jamais rien). Du côté des histoires et enquêtes proposées sur ces deux jeux, comme d’habitude on trouve un peu de tout, certaines affaires plus palpitantes que d’autres, mais toujours une vraie force sur les rebondissements et révélations. L’écriture des Ace Attorney a toujours été leur fort, et Investigations ne déroge pas à la règle. D’autant que le jeu a un vrai style de mise en scène, avec la possibilité de contrôler directement le héros et de profiter d’améliorations visuelles avec des sprites qui ont été redessinés par Tatsuro Iwamoto, le concepteur originel des personnages des spin-off Investigations. De nouveaux visuels plutôt sympathiques, même s’il faut avouer que la possibilité de repasser en en mode pixel art conforme à celui des jeux tels qu’ils sont sortis à l’époque sur Nintendo DS donne un vrai charme à l’ensemble.
Pour le reste, Ace Attorney Investigations Collection profite des améliorations des dernières compilations Ace Attorney comme le mode “histoire” qui permet de faire défiler les chapitres sans avoir à intervenir lors des interrogatoires et la détection des preuves, permettant d’aborder les titres comme de purs visual novel. Mais aussi l’historique de conversations bien utile quand on reprend une partie en cours après une longue pause ou bien la présence du musée où l’on récupère musiques et croquis de personnages pour les fans. La principale nouveauté reste néanmoins l’arrivée de la VF, puisque le premier Investigations n’était traduit qu’en anglais et que le second n’était jamais sorti du Japon. Cette fois-ci et comme pour les dernières compilations sorties, Capcom a fait l’effort de proposer les deux titres intégralement traduits en français. Une excellente traduction, qui assimile et adapte très bien les jeux de mots et sonne très naturelle. Un bel exemple d’adaptation qui s’avère même bien meilleure que la version anglaise.
Conclusion
Peu de surprises pour des titres qu’aiment les fans, mais c’est toujours un vrai plaisir de se replonger dans l’univers de Ace Attorney et d’enfin pouvoir découvrir le second spin-off Investigations qui ne s’était pas encore frayé un chemin vers l’occident. En profitant d’améliorations visuelles et de qualité de jeu similaires aux précédents compilations, les deux jeux s’avèrent plus agréables que jamais à parcourir et la possibilité de jouer dans un style pixel art à la manière des titres originaux est une vraie bonne idée. Pour le reste, on y perd peut-être un peu en gameplay alors que le stylet avait tout son intérêt sur Nintendo DS, mais cela ne retire en rien la qualité d’écriture de deux bons représentants d’une saga d’enquêtes toujours très bien menée.
Test réalisé par Hachim0n sur PlayStation 5 à partir d’une version fournie par l’éditeur.